Sommes-nous en droit de chercher le musicien raté en amont de la littérature ? Que devient en aval, jusqu’à nous, cette figure ? Quelle part de rêve peut comporter ce « ratage » délibéré du « personnage musical » ? Qui se cache derrière la figure du musicien raté : un « vrai » musicien, compositeur et / ou interprète ? Un musicologue, selon la vieille boutade des musiciens ? Un philosophe, depuis Socrate, dont on rapporte le regret de n’avoir pu mettre Ésope en musique, jusqu’à Nietzsche au moins, qui a écrit de la musique, sur la musique, contre la musique ? Et si seul le maître des mots peut vraiment « dire » ce « ratage », l’écrivain veut-il, doit-il, peut-il réchapper du destin de « musicien raté », quand le silence même lui est soufflé par le rythme, et que « les dieux vocaux, asémantiques » chers à Quignard, ne l’écoutent ni ne l’exaucent ?
Autant de questions ayant nourri la réflexion des auteurs de cet ouvrage, lequel propose vingt-et-un articles (émanant tous de conférences données dans le cadre d’un colloque organisé en Sorbonne par Emmanuel Lascoux, Stéphane Lelièvre et Marie-Hélène Rybicki) prenant appui sur des portraits de musiciens ratés ou réputés tels, fictifs ou réels. La question du ratage musical est ainsi abordée en sollicitant les arts, les esthétiques, les périodes, les sphères géographiques les plus divers.