Mel Bonis a été inspirée par les femmes de légende. En 1909, quatre héroïnes ont fait naître chez la compositrice des portraits musicaux. En 1910, elle a écrit Omphale, en 1913, Desdémona, et enfin, en 1922, Mélisande. Au total sept pièces pour piano, regroupées sous le nom de Femmes de Légende, un chef-d'œuvre pianistique au cœur d'une période particulièrement féconde pour la musique française.
Desdémone est un personnage complexe de l'Othello de Shakespeare. Peu avant sa fin tragique, anéantie par le drame de la jalousie, elle chante la chanson du saule. C'est un moment suspendu, hors du temps et de la cruauté des hommes. Mel Bonis a été touchée par la pureté de ce personnage et a trouvé les accents justes pour exprimer sa souffrance et ses larmes. L'héroïne shakespearienne est engagée dans sa passion jusqu'à accepter, résignée, son sort inéluctable.
Dans cette pièce, chaque instrument du trio flûte, alto et harpe trouve son emploi tout naturellement. La mélodie se balance au gré de petites notes ornementales pendant que la harpe pose doucement des basses dans les valeurs longues du chant élégiaque. Quelques scintillements d'arpèges ponctuent les phrases mais l'alto, pour son ultime chant, descend vers le grave avec tendresse et compassion.
Viviane et Phœbé, deux autres Femmes de Légende, ont été également transcrites pour flûte, alto et harpe par Gérard Chenuet et sont disponibles chez le même éditeur.
Afin de parvenir à trouver une écriture spécifiquement adaptée à la harpe, j'ai été conseillé par Véronique Chenuet, harpiste du Trio Mélusine et dédicataire de cette transcription. Le Trio Mélusine a enregistré Desdémona, Viviane et Phœbé, aux côtés d'œuvres de Bridge, De Falla, Zemlinsky et Nazareth, dans un CD consacré à mes transcriptions.
Gérard Chenuet